jeudi, août 03, 2006

Ensemble moyen

Des congés à la Fnac.
Devant le rayon sociologie, oublier la pluie et ces quatre jours de vacances minables.

Cette femme à coté semblait véritablement concentrée dans ses recherches, proche par ailleurs.
Une femme comme d’autres, plutôt mince sans vraiment l’être, sans autre disgrâce apparente que des créoles beaucoup trop grosses pour un visage en longueur.
Elle apparaît d’un classicisme physique qui verra peu influer les marques du temps, tant tout est moyen chez elle.
Depuis le début, traverser les décennies sans sentir les regards changeants des hommes.
Quelque soit l’âge, certaines passent avec la discrétion de la banalité; une vie sans déranger, une vie fantomatique.

Elle est là pourtant, à déambuler entre les clients, les mâles de tous âges toujours partants, celui là qui reluque deux adolescentes, ces deux là, choisissant leur caisse comme moi. Tous les autres qui ne la voient pas.
Elle est là, dans un univers parallèle fait de femmes ni vulgaires, ni belles, ni laides, pire, elle est dans le monde stable de la moyenne. Passant d’épreuve en épreuve avec un 10/20.

Son pouvoir féminin : les coins de bar jadis, accompagné de copines plus belles, plus sexy, ou simplement avec de gros seins. Il suffit d’un plus, un seul.
Alors quelques années, se faire sauter sous l’alcool, en sachant que l’autre est saoule, avoir les premières et dernières expériences.
La fréquentation de femmes plus attirantes entraînant rapidement une fuite dans la solitude discrète, un enfoncement réaliste et une vie maritale précoce. Enfanter et sortir de tout ça.

Ses passages furtifs de gauche à droite lui donnent une petite quarantaine d’années.

Je descends au rayon dvd, en fouillant ici et là avec l’obsession démangeante d’acheter juste pour l’acte, et sortir les mains pleines comme d’autres avalent un quatre quarts.

Elle est là, à quelques mètres. Elle est là alors que je m’en vais vers les thrillers.
Simple hasard. Je l’observe alors, complètement perdue. Elle porte une longue robe beige.
A chaque pied la souffrance de chaussures neuves, deux pansements Compeed pour ampoules couleur chaire, couleur robe.

Je termine ma flânerie au rayon musique électronique, elle disparaît. Le temps passe, je me perds dans les couleurs, mon téléphone vibre, l’appel dure une dizaine de minutes.
On me frôle en cherchant des cd, je me retourne, elle me frôle, retient une phrase, soupire, me sourit puis disparaît entre les rayons.
J’achète Big Fish.