mercredi, mai 10, 2006

Le silence de l'agneau


9h, un rendez vous, plusieurs médecins. J'entre.

Une secrétaire m'invite à attendre un peu plus haut.
Quelques marches à monter, et ce couloir, long, partiellement sombre, silencieux, une clinique à peu de frais.
ça sent comme dans l'allée d'un dentiste, une odeur de bruit sourd, un souvenir de douleur, ça sent l'éclat d'émail, les larmes et la peur viscérale.
Une patiente sort avec ses radios, en larmes. Je ne veux pas savoir, ne pas imaginer. Continue d'avancer. Un néon trop fort s'allume, me surprend.
Les murs lisses brillent par endroit; ici on s'est appuyé longuement, dans l'attente et le doute, ici les questions ont un autre sens.

Dans mon couloir le dessin d'une silhouette silencieuse, à peine en vie.
Sandrine s'appuie contre un mur, Sandrine est une inconnue.

La minuterie s'emballe, son corps m'apparait par tâches. D'abord ses seins, proéminents, en proue poitue m'écument comme je bouillonne d'une envie palpatrice.

Ils déchirent presque un haut noir en laine vierge.
La lumière violente maintenant accouche d'un bonnet D, de cuisses puissantes et graisseuses.
Les yeux de Sandrine sont verts clairs, luisants comme des perles de sueurs sur le front d'une obèse: ils me dérangent.

10mn de conversation. 9mn à parler seul, le temps est court.
Je suis une tête de gondole, il faut m'acheter là.
9m pour être un peu drôle, un peu intéressant, 9mn pour juste ne pas être trop con, à l'aise, être sur. 9mn pour que le peu soit trop peu.

Pourquoi la laisser partir et me maudire ensuite. Je ne la reverrai plus. Oser, même en apnée.
Je lui donne ma carte puisque j'ai une carte maintenant. On vient me chercher.

14h. Elle m'appelle quelques minutes.
17h. J'appelle à mon tour.
Elle me dit que "on habite vers Vienne" et que "on arrive de St Etienne", et aussi que "on a un cocker".
Je me contente d'un "pourquoi pas déjeuner la semaine prochaine".

Il y a pire que les mecs qui baisent tout ce qui bouge; il y a ceux qui choisissent.